L’association Myhodologie s’inscrit dans la continuité de la longue tradition du scepticisme scientifique et du rationalisme moderne. Ces mouvements ont pris une forme organisée en France avec la création de l’Union rationaliste en 1931, une structure soutenue par des scientifiques engagés, contribuant de manière significative à l’établissement d’un secteur public de recherche et à la reconnaissance du statut de chercheur.
Avec le temps, les objectifs de « défendre les sciences« ont pu prendre une multitude de formes, et dans les années 80, une de ces formes va prendre de l’ampleur : la zététique était née. Cette zététique décide de se concentrer sur l’étude des phénomènes paranormaux et de certaines pseudo-sciences comme les « médecines alternatives », et ainsi défendre les « sciences véritables ». L’objectif affiché était de donner des outils individuels aux citoyens pour trier des informations à partir de ces études de cas marginaux. Par exemple : expliquer ce qu’est le biais cognitif de l’effet Forer permet de mieux comprendre le mécanisme d’adhésion à l’astrologie, et permet de se prémunir contre les « discours utilisant des termes flous et mal définis pour susciter l’adhésion« … Cette approche qui s’attarde plus sur la méthode de production des connaissances a contribué a faire découvrir les sciences et la pensée critique à beaucoup de personnes.
L’Observatoire zététique et son impact
En 2003 se crée autour de Grenoble l’association Observatoire zététique. Pendant de nombreuses années, cette association a organisé diverses expériences pour évaluer l’existence des phénomènes réputés paranormaux. Elle a également proposé des articles et des conférences pour aborder ces sujets, rarement traités sous un angle scientifique. L’association s’est concentrée sur l’identification et la critique des « mauvaises manière de penser » ou d’argumenter, par opposition à la véritable « méthode scientifique ». Bien qu’il ne soit pas clairement établi que tous les cas étudiés soient directement transférables ou utiles pour développer une pensée rigoureuse sur d’autres sujets, à l’époque, une telle association représentait l’une des rares sources proposant une perspective alternative sur différentes pseudo-sciences.
L’ère numérique et les divergences au sein de la zététique
Avec l’arrivée d’internet, certaines chaînes youtube se réclamant de la zététique se sont montées, comme Hygiène Mentale, et des cours d’esprit critique ont fleuri un peu partout, à la manière de ceux de Richard Monvoisin. Si ce succès a pu être l’occasion pour beaucoup de personne de découvrir des concepts utiles relatifs à l’esprit critique, l’épistémologie ou la didactique des sciences, cela s’est accompagné par une série de divergences. Toutes les personnes réunies avaient des objectifs et des parcours différents, ce qui a pu provoquer des tensions et parfois des scissions.
L’association Observatoire zététique n’a pas échappé à cette tendance. Elle a inclus dans son histoire des personnes pour qui l’étude du paranormal était une fin en soi, et d’autres pour qui ce n’était qu’un prétexte pour vulgariser des notions scientifiques ou développer une pensée critique. D’un côté des personnes revendiquant une posture de neutralité (ou cherchant à s’en approcher) et de l’autre des personnes qui souhaitent assumer que leurs actions ont une valeur et des conséquences politiques. La question de savoir ce qui relève ou non du champ de la zététique ou des pseudo-sciences à combattre faisant ainsi débats.
Défis et perspectives actuels de la zététique
Des « zététiciens » ont souvent mis l’accent sur les sciences dites « dures », comme la physique ou la chimie, au point de présenter la science de manière réductrice. Cette approche, bien que courante dans le milieu scientifique, a parfois limité l’utilisation de différentes méthodes et sources, notamment celles issues des sciences humaines et sociales ou de la philosophie des sciences. De plus, il y a eu des moments où la zététique, en se concentrant fortement sur des arguments scientifiques, a pu donner l’impression de s’appuyer trop strictement sur l’autorité de « La Science™« . Cela faisait partie d’un débat plus large sur la meilleure façon d’appliquer la pensée scientifique et sceptique aux sujets controversés : les débats ne peuvent pas toujours être tranchés par une série de faits scientifiques. Et faire croire le contraire nous paraît dangereux.
Enfin, il a été observé que le milieu zététique faisait face à des défis en termes d’inclusivité. Historiquement, le domaine semblait être plus accessible et pertinent pour certains groupes sociaux privilégiés, donnant l’impression d’une certaine homogénéité dans son audience et ses participants (beaucoup d’hommes blancs bourgeois). Cette situation pouvait découler de divers facteurs, tels que le choix des sujets abordés, les lieux de rencontre, ou encore une certaine distance par rapport à des questions politiques et démocratiques plus larges. Ces interrogations traversent aujourd’hui l’ensemble du domaine de la zététique et des sciences.
Naissance de Mythodologie
Face à ces défis, un groupe de membres et de sympathisants de l’OZ a initié la création d’une nouvelle association. Celle-ci vise à offrir un cadre plus inclusif et démocratique, reconnaissant ouvertement les implications politiques de son action. Elle cherche également à intégrer un éventail plus large de disciplines scientifiques. Tout en s’écartant de l’étiquette traditionnelle de la zététique, cette nouvelle entité conserve la pensée critique (esprit critique) et la méthodologie sceptique, avec un engagement continu pour l’interrogation et l’apprentissage.
En 2023, Mythodologie est née. La suite, reste à écrire…